Catégorie : Tribunes-Media

Contribuer à la paix dans un contexte de tensions croissantes – Une co-production The Bridge Tank & CGTN Dialogue

Durant le Forum de Paris pour la Paix en novembre dernier, The Bridge Tank a été coproducteur invité d’une édition spéciale de Dialogue, l’émission de débats phare de CGTN. L’émission était dédiée au thème de la paix et la coopération internationale dans un contexte de tensions grandissantes au niveau mondial, dans la continuité du thème du Forum de cette année: « Construire ensemble dans un monde de rivalité. » L’émission s’est penchée sur la nature et les causes de la rivalité, les défis à relever en matière de paix et les pistes possibles d’une collaboration à long terme.

Diffusée depuis Paris, l’émission a été animée par Xu Qinduo, présentateur de Dialogue, et Joel Ruet, président de The Bridge Tank, et a accueilli un panel varié d’experts du monde diplomatique, d’organisations de la société civile et de l’industrie pour traiter de ces sujets :

  • Stéphane Gompertz, ancien Ambassadeur en Autriche & en Éthiopie ; board member de The Bridge Tank,
  • Blessing Ibomo, Fondatrice de Bread’s Earth,
  • Jérémie Ni, Directeur de Chinform.
Revoir l’émission (en anglais)
Les questions abordées durant l’émission
  • Comment se traduit la rivalité dans le monde d’aujourd’hui ?

  • Quels sont les terrains d’entente possibles sur le changement climatique, la cybersécurité ainsi que les conflits en Ukraine, à Gaza, l’instabilité chronique dans certaines parties de l’Afrique, les crises humanitaires et la rivalité entre grandes puissances ?

  • Avec ces crises en cours, la politique d’endiguement technologique menée par les États-Unis à l’égard de la Chine, les tensions entre l’UE et la Chine, comment l’UE et la Chine peuvent-elles trouver des intérêts communs et développer leur coopération bilatérale ?

  • La coopération technologique entre l’UE et la Chine peut-elle être renforcée sans investissements, après le déraillement de l’accord d’investissement ? Les investissements sont-ils possibles sans la confiance ? Cette confiance peut-elle exister dans un monde en crise ?

  • Les crises récentes ont vu les Nations Unies de plus en plus divisées dans leurs votes et résolutions, avec des réponses particulièrement mitigées de la part du Sud. Comment analysez-vous le prétendu fossé entre le Sud et l’Occident ?

  • La Chine a récemment remporté un succès diplomatique au Moyen-Orient, en contribuant au rapprochement entre l’Arabie saoudite et l’Iran. Dans le même temps, l’Inde a annoncé un nouveau corridor économique reliant l’Inde, le Moyen-Orient et l’Europe lors du G20. Quel rôle pouvons-nous prévoir pour les grandes puissances émergentes dans l’ordre diplomatique mondial ?

Quelques citations de nos invités
Sur la rivalité

« Je pense qu’aujourd’hui, les rivalités et les désaccords semblent éclipser les défis communs auxquels nous sommes tous confrontés : des défis à long terme comme le changement climatique, le terrorisme, les pandémies parfois. Et nous avons tendance à oublier qu’au-delà de tous les différends que nous pouvons avoir entre nos pays respectifs, nous sommes confrontés aux mêmes défis pour nous, pour nos enfants et nos petits-enfants. Ces défis vont bien au-delà de nos désaccords actuels. »

Stéphane Gompertz, ancien Ambassadeur en Autriche & en Éthiopie ; board member de The Bridge Tank,

Sur le rôle des puissances émergentes

« Ces puissances émergentes vont jouer un rôle de plus en plus important. En effet, elles peuvent contribuer à améliorer les relations internationales et à résoudre les crises. […] Elles ont une grande influence et il est clair qu’il devrait y avoir plus de coopération entre toutes les puissances, les grands ou les petits pays du monde pour aider à faire avancer les choses. […] La tendance est à l’accroissement du rôle de ces pays émergents dans les affaires mondiales. À condition évidemment que les relations restent amicales, positives et pacifiques, ce rôle peut s’avérer très utile.Cela dépend évidemment de la manière dont chaque pays mène sa propre politique. 

Lorsque nous voyons l’agression insensée de la Russie contre l’Ukraine, nous espérons que l’influence actuelle de la Russie ne sera pas trop grande. 

Lorsque la crise sera terminée, les choses seront différentes. Nous avons besoin de la Russie, la Russie est un grand pays, nous avons toujours eu de bonnes relations avec elle. Ce qu’ils font en ce moment est absolument insensé et nous espérons que cela ne durera pas trop longtemps. Nous parlons beaucoup de multipolarisation, d’un monde multipolaire qui peut en effet être très utile. Le monde ne devrait pas être dominé par un seul pays, mais par une coopération entre tous les pays. »

 

Stéphane Gompertz, ancien Ambassadeur en Autriche & en Éthiopie ; board member de The Bridge Tank,

Faire entendre la voix de l’Afrique

« Je pense que l’une des erreurs que nous commettons est de classer l’Afrique comme une seule nation. L’Afrique compte 54 pays aux intérêts nationaux différents. Nous ne pouvons pas avoir une seule voix pour représenter l’Afrique, c’est impossible. L’Ukraine, par exemple, est la corbeille à pain dont dépendent la plupart des pays africains en termes de céréales et de pain. Je pense que les Nations unies doivent donner aux pays africains, et pas seulement à l’Union africaine, la possibilité d’exprimer leur voix et d’entendre ce qu’ils ont à dire, car les pays ont des intérêts économiques différents en tête, ainsi que des intérêts politiques et historiques qu’ils doivent prendre en compte. Il s’agit d’une relation complexe qui doit être prise en compte dans les divers pays africains. »

Blessing Ibomo, Fondatrice, Bread’s Earth

Sur la coopération technologique

« La Chine étant désormais le principal acteur mondial dans le domaine des batteries, avec 6 des 10 plus grands fabricants de batteries provenant de Chine, c’est un bon moyen pour l’Europe et la France, avec Stellantis et Renault, de travailler avec les Chinois, d’apprendre de la Chine. Et la Chine peut aussi apprendre des Européens. Par exemple, dans l’industrie automobile, la société française STMicroelectronics est le leader en matière de puces utilisées dans les voitures. Les Chinois peuvent apprendre d’eux. Lorsque nous travaillons ensemble, nous pouvons grandir ensemble. »

Jérémie Ni, Directeur de Chinform.

Sur la confiance et la dépendance

« Le mot confiance est très important. Les difficultés que nous rencontrons actuellement s’expliquent par un manque de confiance et de reconnaissance mutuelle des règles du jeu. Un élément qui peut y contribuer, du moins du côté européen, est la peur de la dépendance. Il y a un problème avec les minéraux et terres rares. Par exemple, les Pays-Bas ont décidé de mettre leur veto à l’exportation de semi-conducteurs vers la Chine, qui a riposté en interdisant l’exportation de germanium et de gallium vers l’ensemble de l’UE. Voilà le genre de mesures et de contre-mesures qui peuvent être préjudiciables. Si nous pouvions éliminer cette peur de la dépendance, en encourageant également d’autres sources afin d’équilibrer nos importations, nos exportations et l’utilisation des minéraux, peut-être que cette confiance pourrait apparaître. Mais les règles du jeu devraient être plus claires de part et d’autre ».

Stéphane Gompertz

FRANCE CULTURE – Inde : entre croissance éclatante, défis sociaux et insertion prudente dans l’économie mondiale

Alors que la croissance mondiale est en berne et que l’économie chinoise peine à se relancer, l’Inde semble afficher une santé économique à toute épreuve. Avec une population de 28 ans d’âge moyen, le pays le plus peuplé du globe et cinquième puissance économique mondiale affiche aujourd’hui une croissance de 6%. Mais que se cache-t-il derrière cette situation macroéconomique éclatante ?

Dans l’édition du 16 novembre intitulée « Inde : une croissance sans limites ? », l’émission Entendez-vous l’éco ? présentée par Tiphaine de Rocquigny sur France Culture s’est penchée sur le cas de ce pays qui attire les regards d’un monde qui ne le connait encore que très peu.

Joël Ruet, Président de The Bridge Tank et économiste CNRS à l’Institut Interdisciplinaire de l’Innovation, chercheur senior de la Chaire Technology for Change à l’Ecole Polytechnique, était l’invité de France Culture. À ses côtés :

  • Catherine Bros Professeure d’économie à l’université de Tours et chercheuse au Laboratoire d’économie d’Orléans, spécialiste de l’économie indienne
  • Basudeb Chaudhuri Économiste, chercheur affilié au Centre d’études sud-asiatiques et himalayennes, le CESAH (unité mixte EHESS/CNRS) et de CREM (Centre de Recherche en Economie et Management, Université de Caen et CNRS)
La croissance indienne : sujet de convoitise en trompe-l’œil?

Avec une croissance constante avoisinant les 6%, la situation macroéconomique de l’Inde captive aujourd’hui l’attention de l’opinion internationale. Cinquième économie mondiale après avoir, non sans symbole, dépassé le Royaume-Uni et visant à devenir la troisième puissance économique mondiale derrière les États-Unis et la Chine, l’objectif de l’Inde est fixé : atteindre les 5.000 milliards USD de PIB.

Avec une population jeune, une bonne situation démographique et donc un fort capital humain, tous les voyants semblent au vert pour le pays aux 1,4 milliards d’habitants.

Mais comme a pu le noter Joël Ruet en ouverture, cette santé économique et ce dynamisme national sont-ils bien pérennes et soutenables? En termes de PIB par habitants, l’Inde n’est de loin plus dans le peleton de tête et se classe 125ème au niveau mondial. Car pour que la croissance se traduise en développement, c’est au niveau de la création d’emploi qu’il faut regarder, comme l’a rappelé Catherine Bros.

Aujourd’hui, cette croissance indienne est principalement tirée par les services, un secteur gourmand en formation mais pas en main d’œuvre.

Inégalités et pauvreté

L’autre face de l’Inde n’est donc pas aussi éclatante. Avec près de 50% de la main d’œuvre dans un secteur primaire ne représentant qu’environ 15% du PIB, le fossé entre les villes et les campagnes est toujours bien visible. Le maintien de la croissance aux alentours des 6% depuis les grandes réformes des années 90 est devenu nécessaire pour continuer à fournir de l’emploi dans le secteur formel, alors que près de 3/4 des actifs sont dans le secteur informel, comme souligné par Basudeb Chaudhuri. Malgré cela, cette croissance peine à se répercuter dans le secteur de l’agriculture et dans l’économie rurale.

Là où la Chine a vu ces dernières décennies la pauvreté reculer à tous les niveaux et une classe moyenne prendre forme, l’Inde n’avance pas aussi vite, freinée en partie par son modèle fédéral selon Basudeb Chaudhuri.

Selon Catherine Bros, la pauvreté extrême a très largement diminué et la pauvreté intermédiaire a également entamé sa diminution. Toutefois, la pauvreté reste très forte, avec uniquement 20% de la population indienne y échappant. Les chiffres du gouvernement indien indiquent que 800 millions d’indiens, soit 2/3 de la population, touchent aujourd’hui une forme de subvention (ex. sécurité alimentaire, énergie), un point rappelé par Basudeb Chaudhuri.

Certaines politiques de lutte contre la pauvreté peuvent néanmoins être saluée selon Joël Ruet, celles-ci ayant permis de créer une identité numérique et l’ouverture d’un compte bancaire pour chaque indien jusque dans les villages, permettant ainsi une plus grande efficacité dans la redistribution des aides et l’accès des populations rurales aux services.

La formation: un enjeu d’avenir

Suite à la pandémie de COVID-19, la main d’œuvre dans l’agriculture s’est retrouvée à la hausse, rappelant que ce secteur reste un filet de sécurité pour de nombreux indiens dans un contexte de fragilité économique. Face à ces défis de développement, la formation reste un enjeu de taille.

Bien que près de 100% de la population indienne ait désormais accès à l’instruction primaire, l’instruction secondaire est le théâtre d’une réelle déperdition puisque 70% de la main d’œuvre n’a pas dépassé ce niveau d’instruction. Pis encore selon Basudeb Chaudhuri, le contenu des formations, en particulier celui offert par des institutions privées non contrôlées, est souvent dépourvu de connaissances opérationnelles nécessaires à l’intégration du marché du travail, rendant près de 70% des nouveaux diplômés indiens inemployables.

Souvent comparée à la Chine, l’Inde présente toutefois des différences historiques notables, en particulier dans le secteur industriel, qu’il est impératif de prendre en compte selon Joël Ruet. Là où l’industrialisation chinoise s’est étalée sur presque 70 ans, formant par là-même plusieurs générations d’ouvriers qualifiés, l’Inde n’a pas bénéficié d’une croissance industrielle comparable. Le rattrapage qui s’opère aujourd’hui dans le secteur secondaire s’appuie sur un capital humain ne venant pas d’un monde industriel mais bien paysan, exigeant tout un effort de formation.

Face à de telles contraintes, le temps d’attente pour un emploi qualifié augmente chez les jeunes. Les femmes, quant à elle, se retirent du marché du travail avec seulement 1 femme sur 5 ayant une activité professionnelle rémunérée. Ce retrait s’illustre en particulier dans les zones rurales avec un repli sur le travail non-rémunéré sur les exploitations agricoles. 

L’intégration économique d’un pays-continent

Malgré tous ces défis, l’Inde maintient sa croissance. Mais qu’en est-il de la place du pays dans l’économie mondiale?

Depuis son ouverture à la concurrence dans les années 90, l’Inde oscille entre ouverture et protectionnisme. Le taux d’intégration de l’économie indienne dans le commerce mondial demeure relativement faible aujourd’hui, ayant culminé à 20% dans les années 2010 mais étant redescendu à 10% depuis. L’Inde ne représente aujourd’hui que 1,7% des échanges mondiaux de biens et 3% pour les services.

Cette insertion frileuse se reflète également dans la politique économique mercantiliste de l’administration Modi qui souhaite limiter les importations tout en soutenant les exportations, en particulier pour les secteurs de hautes technologies à travers la création de champions nationaux. L’ambition annoncée par de récents programmes économiques est de rendre l’Inde autosuffisante, en privilégiant la production et l’intégration de l’économie nationale et une insertion stratégique dans les flux mondiaux.

Selon Joël Ruet, le développement interne national des entreprises technologiques indiennes permet déjà leur mondialisation puisque celles-ci sont confrontées à un marché intérieur de taille avec des centaines de millions d’utilisateurs. Elles doivent pouvoir gérer différentes cultures en termes de capital humain mais également développer une approche multi-site et cosmopolite prenant en compte la diversité des villes, langues et cultures du pays.

L’approche économique du gouvernement Modi, ni libérale au niveau domestique, ni au niveau international, est donc bien cohérente avec un contexte d’arrivée tardive de l’Inde dans l’économie mondiale et de tentation grandissante du protectionnisme. L’intégration de l’économie nationale et la création d’une base de production qui puisse être mercantiliste est une étape importante.

Retrouvez toutes les émissions avec Joël Ruet sur France Culture:

 

FRANCE CULTURE – Crédits carbone des forêts tropicales d’Afrique : crise ou Eldorado ?

Dans la continuité des travaux de The Bridge Tank sur la finance verte et de notre investissement dans le cadre du G20 pour une nécessaire implication des organismes financiers du Sud dans la définition de cette dernière, Joël Ruet était l’invité du « Magazine du week-end » sur France Culture pour une émission dédiée aux crédits carbone dans la forêt tropicale en Afrique.

Alors que les projets de compensation carbone sur la base d’efforts de conservation des forêts se multiplient, l’efficacité de ces nouveaux mécanismes financiers est aujourd’hui remise en question. L’émission était l’occasion pour Joël Ruet d’échanger avec Alain Karsenty, Chercheur au Département « Environnements et Sociétés » du CIRAD et Wannes Hubau, Ingénieur biologiste spécialisé dans les forêts tropicales, professeur à l’université de Gand, sur les limites et opportunités de ces modèles de financement climat innovants.

Au micro de Marguerite Catton, Joël Ruet a introduit les grands défis rencontrés aujourd’hui dans la structuration d’outils de finance verte:

« Il y a une finance verte qui est en cours de structuration, qui est nécessaire mais qui n’existe pas, ce qui est le lieu de tous les dangers d’appropriation et d’expropriation. D’autre part, cette finance verte doit à la fois couvrir la finance pour le climat, pour le développement durable et pour la biodiversité. Il y a donc 3 finances qui n’existent pas, qui doivent se définir, se codéfinir simultanément, avec des parties prenantes très disparates : les populations, les états du Sud, les organismes du Nord, et les pouvoirs financiers du Nord. »

Dans ce contexte, les forêts tropicales africaines génèrent un intérêt tout particulier pour des projets de compensation carbone. Souvent décrites comme les poumons de la planète, ces forêts jouent un rôle clé dans la séquestration du carbone et constituent de fait des puits de carbone importants qu’il s’agit aujourd’hui de conserver. Les projets de compensation carbone sur la base d’actifs forestiers offrent ainsi une finance d’un nouveau genre,

« une finance qui ne va plus être dans les ordinateurs de Wall Street ou de la city mais géolocalisée dans des endroits où les gens vivent, où les états souverains essaient d’être souverains sur le plan économique. »

La structuration d’actifs financiers sur la base de la capacité de ces forêts à capter et séquestrer du carbone dépend toutefois de certaines conditions, comme a pu le noter Alain Karsenty, Chercheur au Département « Environnements et Sociétés » du CIRAD.

« Ce n’est pas parce qu’un pays a une forêt qui absorbe du CO2 qu’il peut vendre des crédits carbone, l’absorption doit être additionnelle. Il faut qu’un pays puisse démontrer qu’il a pris des mesures pour réduire la déforestation par rapport à un scénario de référence. »

Prenant l’exemple du Gabon, Joël Ruet a souligné les nécessaires arbitrages politiques à l’incorporation de la forêt tropicale dans la CDN du pays. Il s’agit en premier lieu de différencier ce qui relève du don de la nature d’une part et des efforts de protection consentis dans le puits de carbone actuel de l’autre, ainsi que de modéliser l’avenir, une tâche difficile tant l’incertitude est quasi-entière sur la réaction des forêts au changement climatique en cours.

Si la forêt gabonaise absorbe aujourd’hui 100 millions de tonne de CO2, le simple maintien d’une telle capacité d’absorption à l’horizon 2050 nécessitera des efforts de conservation et de non-déforestation importants. Ceux-ci impliquent des mesures inconditionnelles et d’autres conditionnelles au financement international.

La dichotomie entre eldorado & crise des crédits carbone émane donc également de l’incertitude autour du périmètre ainsi que de la durabilité du sous-jacent: de sa stabilité biologique dans le temps, des modèles scientifiques sur lesquels ces mécanismes de compensation reposent, et de la sincérité des mesures et certifications par des acteurs privés intéressés au résultat.

Selon Wannes Hubau, ingénieur biologiste spécialisé dans les forêts tropicales, professeur à l’université de Gand, l’augmentation de la concentration de carbone dans l’atmosphère affecte directement la forêt:

« avant les émissions de CO2 les forêts matures étaient en équilibre avec l’atmosphère donc il y avait du carbone séquestré par les arbres qui poussent et dégagé par les arbres qui meurent, mais maintenant on a découvert que cette pratique libre n’existe plus. A cause d’une fertilisation du CO2 il y a plus de croissance et donc plus de carbone capturé que de carbone qui échappe alors les forêts sont devenues un puits de carbone. »

De nombreux défis d’inclusivité et de justice sociale subsistent encore pour ce marché encore balbutiant,

« c’est un marché relativement jeune. Il faudra encore améliorer les réglementations pour que les fonds arrivent vraiment aux villages où se trouvent les gens qui protègent la forêt. »

Alain Karsenty pointe également du doigt les questions de crédibilité, d’efficacité et d’intégrité environnementale de ces compensations carbone.

« Tout est basé sur un scénario de référence. Cela peut être le passé, en comparant avec les niveaux de déforestation dans le passé […] ou alors un scénario business as usual, avec une déforestation augmentant dans des proportions prédéfinies pour répondre à des besoins de développement et de population qui augmente. Or ces scénarios sont à la main de ceux qui les produisent, c’est-à-dire les gens qui élaborent des projets, ou les états qui élaborent leurs scénarios de référence. On ne peut pas les contester et ces scénarios impliquent souvent de fortes augmentations de déforestation. […] Il y a un problème de crédibilité majeur du point de vue de l’intégrité environnementale de ces mécanismes. »

OPENBOX TV avec Alain Juillet – Inde/France: un partenariat stratégique

À l’occasion de la visite d’État du premier ministre indien Narendra Modi en France, reçu comme invité d’honneur du défilé du 14 juillet, Joël Ruet était l’invité d’Alain Juillet, ancien Haut-Commissaire à l’Intelligence Économique à Matignon, sur OpenBoxTV pour une émission spéciale sur l’Inde et son importance partenariale stratégique pour la France.

« L’Inde est un pays plus vaste que le monde, » disait le poète et ancien ambassadeur du Mexique en Inde Octavio Paz. C’est à partir de ce constat que Joël Ruet et Alain Juillet ont exploré ensemble la diversité et complexité sociétale, politique, économique et géopolitique de la « plus grande démocratie du monde ». De la Chine à la France, en passant par l’Angleterre, Joël Ruet a également abordé le positionnement stratégique de l’Inde face au monde, entre non-alignement et alliances partielles, et l’importance d’un partenariat continu entre la France et l’Inde.

Retrouvez l’émission en intégralité:

Tribune: « Conférence de l’ONU sur l’Eau à New-York : Chronique de 3 morts annoncées »

Par Erik Orsenna, Joël Ruet, & Hamed Semega. Publié dans Atlantico le 28 mars 2023.

« Ces trois morts sont des fleuves. Ils s’appellent Sénégal, Gambie et Niger.

Ils sont aussi des noms de pays car sans eux, sans l’apport de leur eau, ces pays vont s’assécher. Et mourir.

Ces fleuves sont enfants d’un même château d’eau, un trésor de la nature, le massif forestier du Fouta Djallon. Un massif généreux de dizaines de sources pour chaque fleuve mais ravagé, chaque année davantage, et qui se meurt dans l’indifférence générale.

Comment ne pas être avec les populations locales, qui ont besoin de bois de chauffe, de nourriture, pâture pour leurs bêtes, tout autant que d’activité économique ? Comment ne pas se saisir régionalement de cet enjeu majeur pour plus de 300 millions d’Africains de l’Ouest nourris par ces fleuves ? Comment ignorer cet enjeu pour la sécurité mondiale : le Fouta Djallon est la véritable profondeur stratégique et écologique du Sahel.

La conférence sur l’eau organisée à New-York du 22 au 24 mars sera l’occasion de lancer l’alerte.

Plutôt que de simplement dresser un constat, nous choisissons la voie des solutions avec un accompagnement réel des populations locales dans leur volonté de revisite de leurs traditions territoriales : nouvelles énergies, nouvelles formes de pâturage, création de points d’eau adaptés. Une organisation différente doit pouvoir émerger, pour une meilleure protection des sources par les communautés.

Les nouvelles technologies et la data (systèmes de captages innovants, satellites d’observation, nouvelles formes d’irrigation en goutte à goutte, généralisation des pratiques agroécologiques sobres en carbone du Sahel, etc..) offrent l’opportunité du partage et de la consolidation des connaissances par de véritables plateformes. Elles doivent être prises en main non pas par des start-ups étrangères mais par les jeunes entrepreneurs africains, au sein d’incubateurs.

Le levier de passage à l’échelle de ces nouvelles dynamiques est la finance, au sens noble du terme, donc la finance « durable » (verte et bleue, ou encore l’échange « dette contre résultats environnementaux »), qui s’appuie sur ces mêmes données géo-localisées sur des centaines de sources et points écologiques.

Instances locales, entrepreneurs environnementaux régionaux, data et finance durable mondiale: c’est une nouvelle coalition transnationale qui doit s’organiser, mettant les communautés au coeur du système, pour prendre en main cette transition, avec des actions concertées entre les pays concernés et avec les organismes de bassins africains.

C’est ce plan de sauvegarde, de sauvetage même, que nous présenterons au siège de l’ONU le 24 mars et pour lequel nous espérons attirer l’attention des décideurs et de financeurs.

Dans « un village dont on ne peut que partir, la pluie ne tombe plus, elle demeure en suspens. Le fleuve est à sec », dit le beau conte du mozambicain Mia Couto, la pluie ébahie. Ne restons ni en suspens ni ébahis : l’avenir de ces trois grands fleuves africains est en jeu. »

Erik Orsenna

membre de l’Académie française, Président d’Initiatives pour l’Avenir des Grands Fleuves (IAGF)

 

Joël Ruet

économiste à l’Institut interdisciplinaire de l’innovation (i3), CNRS & Président, The Bridge Tank

 

Hamed Semega

ancien Ministre de l’eau du Mali, ancien Haut-Commissaire de l’Organisation pour la Mise en Valeur du fleuve Sénégal (OMVS)

Pour lire le compte-rendu de notre side event “Le Fouta Djalon: Visions & Actions pour la Sauvegarde du Chateau d’Eau de l’Afrique de l’Ouest » organisé par IAGF, The Bridge Tank et l’OMVS durant la Conférence des Nations Unies sur l’Eau 2023, cliquez ici.

TV5MONDE Info – Hakima el Haité revient sur une COP 27 décevante

Lors d’une intervention dans « 64′ Le Monde en français » sur TV5MONDE Info, notre board member Hakima el Haité, ancienne Championne du Climat auprès des Nations unies, ancienne Ministre de l’Environnement du Maroc, a exprimé sa déception et son inquiétude face au manque d’avancées majeures lors de la COP 27 à Charm el-Sheikh en Egypte.

Hakima el Haité s’est dite « lamentablement déçue par les résultats: aucun engagement et aucune mesure concrète de réduction des gaz à effet de serre » en particulier de la part des grands émetteurs.

L’intervention d’Hakima el Haité dans son intégralité:

Canicule en Inde en plein mois d’avril – Joël Ruet sur France 24

Le samedi 30 avril 2022, notre Président, Joël Ruet s’est exprimé sur la chaîne d’information France 24 au sujet de la canicule qui frappe l’Inde et le Pakistan ces derniers jours. Les températures ont atteint les 46°C dans la capitale indienne New Delhi. Il s’agit d’un événement climatique majeur pour l’Inde, et plus largement pour la planète puisqu’il est exceptionnel que les températures dépassent le seuil de 40°C dans le pays au mois d’avril.

Lors de l’interview, Joël Ruet a souligné 3 principaux points :

  1. La question de l’adaptation pour l’Inde sera plus importante qu’ailleurs. Lorsqu’une augmentation moyenne de la température atteindra 1°C supplémentaire sur la Terre, l’Inde connaitra une augmentation moyenne de 3°C. Les dérèglements climatiques sont et seront donc plus extrêmes en Inde qu’ailleurs.
  2. La canicule actuelle en Inde est un symptôme de la non anticipation de la question de l’adaptation. L’Inde paye de prix du retard d’un certain nombre de réformes et de politiques publiques, notamment sur les questions du traitement des déchets et des décharges.
  3. Des départs de feu dans des décharges restent des phénomènes relativement rares mais demeurent très inquiétants. Ces départs de feu sont provoqués par les émissions de gaz provenant des déchargent – ces gaz s’appellent des émissions fugitives. Il ne faut pas confondre émission, dont la portée est globale, et pollution, qui quant à elle est une problématique locale. L’Inde est l’un des plus grands émetteurs. Les effets de politiques publiques en retard se retournent vers une mauvaise gestion de l’exploitation et de la distribution électrique, l’eau, l’agriculture et également, les émissions fugitives. Si l’Inde limitait ses émissions, elle limiterait également ses pollutions.

Pour revoir son intervention, consultez notre chaîne Youtube.

Risky Business : Les États-Unis devraient repenser leurs relations commerciales avec le Kazakhstan

Un article écrit par notre président, Joël Ruet, sur le défi actuel et croissant que représente pour le Kazakhstan la lutte contre la corruption qui mine les investissements étrangers et le développement socio-économique du pays, a été publié dans le média Entrepreneur.com. Il alerte que « malgré la campagne publique du gouvernement kazakh pour attirer les investisseurs étrangers […], il devra mettre en œuvre des changements fondamentaux, et cela commence par prendre au sérieux la lutte contre la corruption et honorer les accords avec les investisseurs étrangers. D’ici là, les investisseurs américains devraient reconsidérer le risque de faire des affaires au Kazakhstan. »

« Profit et pandémie : L’OMC et l’industrie pharmaceutique en besoin d’introspection », tribune de notre board member Pranjal Sharma

Dans le contexte actuel de la pandémie de la Covid-19, notre board member, Pranjal Sharma, a écrit la tribune suivante, publiée par le Daily Guardian, sur les avantages de la renonciation aux DPI (droits de propriété intellectuelle) sur la production de vaccins, en particulier pour les pays à faible revenu, à l’instar de l’Inde et des pays du contient africain.

Lire sa tribune ici (en anglais): https://thedailyguardian.com/profiteering-pandemic-wto-pharma-industry-must-introspect/

France 24 – Intervention de Joël Ruet sur le Congrès 2021 du Parti communiste chinois et les difficultés économiques chinoises

Le Parti communiste chinois (PCC) a entamé le 8 Novembre 2021, sa plus importante réunion de l’année, qui doit inscrire dans le marbre la vision historique du président Xi Jinping. Au pouvoir depuis neuf ans, l’homme fort de Pékin s’apprête dans un an à obtenir un troisième mandat à la tête du PCC – renforçant encore sa stature de dirigeant le plus puissant du pays depuis le fondateur du régime communiste, Mao Zedong, au pouvoir de 1949 à 1976. Pourquoi cette résolution? Selon notre Président, Joël Ruet, cela pourrait être un aveu de faiblesse.

Regarder son intervention ici.

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