COP 27 : Une avancée sur les pertes et dommages mais pas de percée sur la finance climat malgré une forte implication de l’Afrique de l’Ouest

La crainte de terminer la COP 27 sans aucune avancée significative planait sur Charm el-Cheikh durant les dernières heures de la Conférence des Nations Unies sur les changements climatiques.

Mais après un ultime marathon de négociations entre les parties, un accord a finalement été trouvé.

L’accord qui a conclu deux semaines de discussions et de négociations dans la ville côtière égyptienne a permis de faire un grand pas en avant sur la question épineuse des pertes et dommages. Les parties se sont mis d’accord sur l’établissement d’un fonds pour les pertes et dommages qui aidera à soutenir les pays les plus touchés par le changement climatique. Le fonds devrait fournir une assistance financière afin de répondre aux effets catastrophiques de la crise climatique, tels que les sécheresses, les vagues de chaleur, les inondations ou les cyclones.

Les efforts demeurent insuffisants

Bien qu’encourageant comme signal de solidarité internationale en réponse aux catastrophes climatiques, l’accord final n’a pas répondu aux attentes et aux espoirs de nombreux participants à la COP 27. Dans une interview pour TV5 Monde, Hakima El Haite, board member de The Bridge Tank, a exprimé sa déception face au manque d’avancées lors de la COP 27 :

« C’est vrai qu’on a avancé d’un pas en se mettant d’accord sur la création d’un mécanisme qui va encore nécessiter du temps. Plus on atténue le CO2 et plus on diminue les concentrations en CO2, moins on aura besoin de nous adapter et moins on aura besoin d’argent pour réparer les dégâts des dommages et catastrophes naturelles. Il faut donc agir et ce n’est pas aux pays vulnérables d’agir, ce sont les pays émetteurs qui émettent 80% des émissions qui doivent apporter 80% de solutions dans leurs propres pays. »

Nombreux sont ceux qui partagent cet avis, en particulier dans le Sud et en Afrique de l’Ouest, une région confrontée aux effets les plus désastreux du changement climatique et qui s’est présentée à la COP 27, COP africaine, avec des attentes et demandes fortes.

Une présence ouest-africaine proactive à la COP 27

Les représentants des pays d’Afrique de l’Ouest étaient arrivés à la COP 27 avec l’espoir de voir des décisions fortes prises pour soulager le continent de la pression climatique qu’il subit. Avant le début de la COP 27, la Communauté économique des États d’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) avait exprimé certains des points qu’elle considérait comme cruciaux pour le succès des négociations sur le changement climatique :

  • Augmenter l’ambition de réduction des émissions de gaz à effet de serre, en particulier pour les plus gros émetteurs.
  • L’article 6 de l’Accord de Paris : la génération de nouvelles opportunités de financement dans la région et les nouveaux mécanismes de marchés carbone
  • Adaptation : passer de la planification à l’opérationnalisation
  • Pertes et dommages : apporter des réponses concrètes aux pertes et dommages existants en Afrique de l’Ouest.
  • Finance climat : atteindre l’objectif de 100 milliards de dollars du Fonds vert pour le climat et mettre en place une facilité financière spécifiquement dédiée aux pays africains pour se concentrer sur leurs besoins et priorités en termes d’adaptation.

Décidées à faire entendre la voix de la sous-région à la COP 27, les institutions d’Afrique de l’Ouest ont uni leurs forces à Sharm el-Sheikh au sein du Pavillon West Africa. Ce pavillon était copiloté par la CEDEAO et la Banque ouest-africaine de développement (BOAD), en partenariat avec l’Union économique et monétaire ouest-africaine (UEMOA) et le Comité permanent inter-États de lutte contre la sécheresse dans le Sahel (CILSS).

Selon la CEDEAO, « ce pavillon conjoint témoigne de la volonté des institutions régionales de renforcer leur coopération autour du défi commun que constitue la question des changements climatiques pour une meilleure coordination et efficacité de la réponse collective à apporter au bénéfice des populations de la région. »

Pendant deux semaines, les quatre institutions ouest-africaines ont ainsi contribué à faire avancer le débat public sur l’action climatique et la finance climat.

Des voix importantes pour la gouvernance et la finance climat

La Commission de la CEDEAO a profité de sa présence au Pavillon West Africa pour organiser des side events présentant la Stratégie régionale sur le climat de l’union, notamment une session le 9 novembre sur les mécanismes de coordination pour une meilleure gouvernance climatique régionale. Deux jours plus tard, le 11 novembre, un autre side event aborda les opportunités sectorielles que la stratégie offre pour l’agriculture et l’énergie.

La Banque ouest-africaine de développement (BOAD) a également été très active sur le Pavillon. Le 9 novembre, Serge Ekué, président de la BOAD, a donné un point de presse sur le positionnement climatique de la BOAD. Ce fut l’occasion d’évoquer le Plan de Développement Stratégique Djoliba 2021-2025 de la BOAD, qui consacre 25% des engagements totaux de la banque à la finance climat afin d’accompagner les États membres dans le financement de leurs Contributions Déterminées au niveau National (CDN) et à la réalisation des Objectifs de Développement Durable (ODD). À travers son président, la BOAD a exprimé son souhait d’être un catalyseur de la résilience et de l’adaptation au changement climatique tout en jouant un rôle de facilitateur d’une croissance durable et stable.

Capitalisant sur l’importance de la finance climat lors de la COP 27, la BOAD a organisé plusieurs événements sur le sujet, dont un panel sur « Défis et opportunités de la finance climat en Afrique, » et deux sessions le 14 novembre, « Combler les lacunes des politiques d’adaptation au changement climatique pour faciliter l’accès des pays de l’UEMOA à la finance climat » et « La finance carbone comme levier de développement pour les pays de l’UEMOA, » avec la participation de l’Alliance Ouest-Africaine sur le Marché Carbone et la Finance Climat.

La BOAD a également pris part à des sides events organisés par d’autres institutions à Sharm el Sheikh, dont un par le Fonds vert pour le climat sur la Grande Muraille verte pour le Sahara et le Sahel.

L’importance de la finance climat dans l’agenda de cette année à la COP 27 a également mobilisé The Bridge Tank, qui a co-organisé un side event avec Liberal International sur la dynamique Nord-Sud de la finance climat. Le panel « Towards a balanced, empowered, North-South blended climate finance for mitigation and adaptation » a notamment inclus des acteurs politiques et institutionnels important d’Afrique de l’Ouest et a ajouté une pierre à l’édifice dans la poursuite d’une finance climat plus efficace et équilibrée.

Malgré les appels à prendre des mesures audacieuses, l’accord final de la COP 27 est une conclusion décevante aux deux semaines d’effort et d’investissement des institutions et pays d’Afrique de l’Ouest à Charm el-Cheikh. Le souhait de faire de cette COP 27, COP africaine, une étape importante dans la lutte contre le changement climatique et la mise en place de mécanismes de finance climat durables assurant la préservation du continent n’a pas été réalisé.

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