Alors que l’Europe est aux prises avec des prix de l’énergie élevés et des perturbations dans son approvisionnement énergétique à la suite de l’invasion de l’Ukraine par la Russie, œuvrer à la transition énergétique de l’Europe n’a jamais été aussi urgent – mais aussi riche en nouvelles opportunités. Lors du Concordia Europe Summit qui s’est tenu à Madrid, en Espagne, Raphael Schoentgen, board member de The Bridge Tank et PDG fondateur de Hydrogen Advisors, a participé à un panel sur le thème « Europe’s Energy Landscape : Alternatives for the Renewable Transition » (Paysage énergétique européen : alternatives pour la transition vers les énergies renouvelables).
À ses côtés, Ana Palacio, ancienne ministre espagnole des affaires étrangères, Teresa Parejo, directrice en charge du développement durable chez Iberia Airlines, et German Alcayde, Board Member, HVR energy, qui a animé la session, ont échangé sur cette question.
L’évolution du paysage énergétique européen
S’appuyant sur sa vaste expérience dans le secteur de l’énergie, après avoir été CTO et membre du comité exécutif d’ENGIE et maintenant expert et entrepreneur dans le domaine de l’hydrogène, Raphael Schoentgen a ouvert les discussions en rappelant que 80 % de l’énergie utilisée aujourd’hui en Europe est sous forme solide, liquide ou gazeuse. La transition énergétique ne doit donc pas se concentrer uniquement sur l’électricité. Aujourd’hui, les énergies renouvelables représentent 40 % du réseau électrique européen. Cependant, l’électricité ne représente que 20 % de l’énergie que nous consommons, de sorte que les énergies renouvelables ne représentent que 8 % de la consommation totale d’électricité. L’Europe importe aujourd’hui encore 85 % de son énergie ( carburants compris). Elle ne sera donc pas autosuffisante du jour au lendemain, a affirmé M. Schoentgen.
Le chauffage constitue le besoin énergétique le plus important en Europe, avec 40 % de la consommation totale. Celui-ci est principalement alimenté par le gaz. Viennent ensuite les transports, avec 30 %, principalement sous forme liquide. M. Schoentgen a par conséquent exprimé sa confiance dans le potentiel de l’hydrogène, qui constitue à la fois un bon complément à l’énergie verte et un substitut au gaz naturel, qui peut renforcer la production de biogaz.
Encourager le développement et s’adapter à un environnement international changeant
Raphael Schoentgen a toutefois mis en garde contre l’imposition de restrictions au développement de l’hydrogène en Europe, appelant les décideurs à être concrets et non dogmatiques. Les actes délégués de la Commission européenne relatifs à l’hydrogène compliquent considérablement le développement de cette technologie, car l’accent mis sur les émissions nulles de CO2 et de gaz à effet de serre est trop contraignant.
Mettant les efforts européens en regard des trajectoires énergétiques internationales, Ana Palacio a partagé son analyse de l’état des lieux aux Etats-Unis. La loi sur la réduction de l’inflation de 2022 (IRA), promulguée en août 2022, contient 500 milliards de dollars de nouvelles dépenses et d’allègements fiscaux visant – parmi d’autres priorités – à stimuler les énergies propres. Ana Palacio a fait remarquer que si l’IRA était neutre sur le plan technologique, le Green Deal européen n’affichait pas cette neutralité technologique puisqu’il rejetait l’énergie nucléaire. Raphael Schoentgen a confirmé ce point, lui qui venait de rentrer de Washington D.C., où il avait assisté à la publication de la stratégie américaine sur l’hydrogène.
Revenant sur les importations d’énergie en Europe, Ana Palacio a souligné les efforts de l’Espagne pour ne pas se rendre dépendante d’un seul pays (contrairement à la dépendance de l’Allemagne vis-à-vis du gaz russe). Au contraire, l’Espagne a construit une flottille de terminaux énergétiques pour conserver son indépendance.