Par Joël RUET et Malaurie LE BAIL – Après avoir été reportée à quatre reprises en raison de la pandémie, la COP 15 sur la biodiversité aurait dû débuter le 25 avril 2022 à Kunming en Chine. Désormais reportée à la fin d’année 2022 à Montréal au Canada pour raisons logistiques et sanitaires, la Chine en assumera, cependant, toujours la Présidence. Peu de couverture médiatique, peu d’analyses académiques et journalistiques, la COP 15 est la grande absente de l’actualité internationale à l’heure où les écosystèmes s’épuisent. La responsabilité n’en incombe-t-elle pas au pays hôte, peu impliqué : la Chine ?
Au travers de cette COP 15, la Chine a manqué une opportunité diplomatique majeure en termes de visibilité et d’avancement des thèmes environnementaux. La communication de la Chine a été brouillée dès le début, avec le report annoncé mais le maintien partiel de la COP 15. La réunion virtuelle d’octobre 2021 a été marquée par la promotion d’un « consensus de Kunming » qui n’a en réalité pu être négocié qu’en mars 2022 à Genève. Ce qui est devenu une « pré-COP » n’est apparue que très peu dans les médias occidentaux. Pétrie de rhétorique, cette « pré-COP » n’est en fait qu’une coquille vide.
La faible présence de la Chine à la COP 26 sur le climat n’était déjà pas passée inaperçue. Elle est l’un des nombreux pays dont le principal dirigeant n’a pas participé en personne, aux côtés du Brésil, de la Russie et de la Turquie. Au lieu de cela, la Chine a été représentée par l’envoyé spécial pour le climat, Xie Zhenhua, qui a évoqué brièvement les engagements continus du pays en matière de réduction des émissions de carbone sans faire de nouvelles déclarations, ce qui n’a pas été sans remettre en question l’engagement du pays dans la lutte mondiale contre le changement climatique. C’est un secret de polichinelle que l’extension de la COP26 à la COP27 de la date butoir pour des Contributions Déterminées Nationales (CDN) est largement due à ce faible engagement chinois à Glasgow.
Être l’hôte d’une conférence mondiale comporte son lot de récompenses et d’auto-promotion, mais, entre propagande et absence, des doutes sont apparus quant à la capacité de la Chine, l’un des plus grands émetteurs de CO2 et de plastique au monde, à assumer ses responsabilités en tant que pays hôte de la COP 15. La Chine n’a pas encore signé l’Engagement mondial sur le méthane, une promesse lancée par les États-Unis et l’Union européenne lors de la COP 26, ainsi que par 103 pays représentant 70 % de l’économie mondiale, pour maintenir à portée de main l’objectif de limiter le réchauffement de la planète à 1,5 degré.
Selon les observateurs de Glasgow, la Chine continue de s’isoler de plus en plus de la sphère internationale. Le manque d’information et de transparence concernant la COP 15 ne fait que renforcer ce qui a été dit par ces observateurs. De plus, la COP 15 est la première grande conférence mondiale au sein du système des Nations unies officiellement labellisée sous le concept de « civilisation écologique », concept proposé par Xi Jinping et largement déployé par la propagande chinoise. Mais la COP 15 accouche d’une coquille vide.
L’Union européenne s’est, quant à elle, dans le même temps fixée des objectifs ambitieux : réduire les émissions de carbone de 55 % d’ici 2030 et devenir neutre en carbone d’ici 2050. Pour l’Europe, la COP 15 et la COP 26 ont été largement considérées comme de simples continuations du Congrès mondial de la nature de l’UICN, qui s’est tenu en septembre 2021 à Marseille, en France, et qui a abouti au « Manifeste de Marseille », également appelé « feuille de route » des négociations internationales, appelant les gouvernements à s’engager dans des plans ambitieux de conservation de la nature. L’UE réfléchit à un protocole sur la préservation de la biodiversité par un commerce plus attentif à cette dernière et à une limitation de la « déforestation importée ». Rien d’aussi précis dans la « civilisation écologique » chinoise.
Il manque à la COP sur la biodiversité un équivalent de ce que l’ « Accord de Paris » est à la COP sur le changement climatique. La Chine avait un rôle à jouer dans le soutien de cet événement. Signe de repliement sur soi, la communication, en amont et en aval de l’événement COP de Kunming, est plus que médiocre. L’attitude « profil bas » de la Chine ne fait qu’aggraver le manque de sensibilisation et de communication auprès du grand public sur les questions de biodiversité à l’échelle internationale.
En phase avec le calendrier international, The Bridge Tank s’est positionné sur le sujet et a rédigé un rapport. Lire notre analyse approfondie ici.