Le 30 juin 2023, Joël Ruet s’est entretenu avec l’ancien Ministre d’État, Ministre de la Transition écologique et solidaire, et ancien Président de l’Assemblée Nationale, François de Rugy, et l’actuelle Ambassadrice du Kazakhstan en France, Gulsara Arystankulova, sur la relation bilatérale entre la France et le Kazakhstan et les perspectives de partenariats énergétiques et technologiques entre les deux pays.
Ces échanges se sont déroulés dans le cadre d’un colloque organisé dans l’enceinte du Sénat sur le thème « Souveraineté énergétique de l’Europe et de la France : quelles solutions, quels partenaires ? » L’action récente de The Bridge Tank au Kazakhstan s’illustre notamment par notre contribution au développement d’un méchanisme d’enchères pour les énergies renouvelables en partenariat avec le PNUD en 2021 et la mise en lumière des défis rencontrés par les investisseurs étrangers dans le pays.
Ambitions et coopérations futurs
Durant son intervention, l’Ambassadrice Gulsara Arystankulova a insisté sur la profondeur des relations entre la France et le Kazakhstan et l’étroite coopération qui relie les deux pays dans le domaine énergétique. En novembre 2022, le président du Kazakhstan Kassym-Jomart Tokaïev avait ainsi été reçu à Paris par le président Macron. Cette coopération s’est particulièrement renforcée depuis le début de l’invasion de l’Ukraine par la Russie, le Kazakhstan offrant une alternative importante au pétrole et au gaz russe. Riche en matières premières et géant pétrolier d’Asie Centrale, le pays joue un rôle clé dans l’approvisionnement énergétique de l’Europe et sera un acteur central de l’avenir énergétique du continent.
Car malgré son statut de géant pétrolier, le Kazakhstan mène une stratégie de transition énergétique ambitieuse qui vise à gazéifier son mix énergétique et à atteindre 50% d’énergies renouvelables d’ici 2050. Pour répondre aux défis d’approvisionnement et d’interconnexion liés à la taille du pays, le Kazakhstan mise sur une dynamique de décentralisation énergétique qui s’appuie sur des mini-systèmes énergétiques verts subventionnés par l’État.
L’ambition de neutralité carbone du Kazakhstan à l’horizon 2060 s’appuie sur des atouts non-négligeables. Avec ses grands espaces, son fort ensoleillement et ses ressources en terres rares, le pays présente un fort potentiel pour le développement d’énergies renouvelables. Des groupes français se positionnent déjà, comme par exemple TotalEnergies qui a lancé un projet de parc éolien terrestre de 1GW dans la région de Zhambyl au sud du Kazakhstan, en partenariat avec le National Wealth Fund Samruk-Kazyna et la National Company KazMunayGas.
Partenariats et enjeux de souveraineté
Selon Joël Ruet, de nombreuses perspectives de coopération énergétique, technique et technologique existent entre la France et le Kazakhstan. Premier producteur mondial d’uranium, le Kazakhstan fournit par exemple l’uranium nécessaire au fonctionnement des centrales nucléaires françaises, à travers une coopération étroite avec le géant français du nucléaire Orano.
En tant que troisième investisseur étranger au Kazakhstan, la France a tout intérêt à se positionner afin de générer des nouveaux partenariats et de lancer des nouvelles filières, mais également afin de continuer de développer ses savoir-faire et ressources humaines, en particulier à travers le nucléaire et l’hydrogène. La coopération entre la France et le Kazakhstan ne peut donc pas se limiter à sa composante énergétique et à l’approvisionnement de matières premières. Cette coopération doit enrichir son volet technique et technologique afin de développer la recherche, la connaissance, et l’innovation communes dans le secteur.
Dans le cadre de ces partenariats, il est important de considérer l’énergie sous ses différentes formes, non seulement à travers la question de l’électrification mais en prenant en compte l’énergie sous sa forme liquide et gazeuse puisque celle-ci présente une part importante des mix énergétiques.
Plaçant ce constat dans la réflexion sur la souveraineté énergétique française, François de Rugy a insisté sur le fait que cette dernière n’était pas seulement une question d’électricité mais de pétrole et de gaz – des ressources dont la quasi intégralité est importée dans le cas de la France. Pour assurer la sécurité d’approvisionnement, il faudra donc diversifier les sources d’approvisionnement mais également électrifier des usages en décarbonant les transports, le chauffage, ou encore l’industrie.
Néanmois, la France a ces dernières années fait face à un nouveau défi découlant de l’affaiblissement du taux de disponibilité des centrales nucléaires pour des raisons de maintenance et de capacité de production en baisse. Selon François de Rugy, il est donc crucial d’investir à la fois dans les énergies renouvelabes et dans le renouvellement du parc nucléaire français en utilisant les forces et expertises françaises dans ces domaines.
Le développement énergétique du Kazakhstan présente indubitablement un fort potentiel de coopération avec la France et l’Europe. Si celui-ci permet actuellement d’assurer l’approvisionnement en combustibles fossiles au vieux continent, le pays sera dans le futur un partenaire important de la transition énergétique et du développement des énergies renouvelables et décarbonées.